L'emplacement du monument
Ce monument est essentiellement dû à la volonté d'un homme et à la part qu'il prit dans sa conception, sa réalisation et son financement.
Cet homme, Gaston Bonnin, était à cet époque l'instituteur du village, véritable "hussard noir de la république", fervent républicain. Né à la Couarde, il avait épousé une autre enfant du pays, Noémie Brullon, fille d'instituteur et institutrice elle même. A la veille de la guerre, tous leurs espoirs reposaient sur leur fils unique Roger, élève brillant, poête à ses heures, suivant les cours de l'école normale de Poitiers. Mobilisé, Roger est un excellent soldat, sous-lieutenant au 91e régiment d'infanterie. Il est détenteur de la croix de guerre, il est cité à l'ordre du régiment. Ses brillants états de service lui valent d'être détaché au groupe de division d'armement d'aviation. Hélas il est grièvement blessé au cours d'un vol d'entraînement et ses parents accourus à l'hôpital de Juilly assisteront à son agonie en juillet 1917.
Lorsque le 24 novembre 1918 le conseil municipal se réunit pour décider du choix de l'emplacement du monument aux morts, Gaston Bonnin s'oppose au choix du maire qui veut l'ériger dans le cimetière. Il propose de créer un square au terroir dit "des Garennes", qui est proche du cimetière où repose son fils, en face du symbole républicain représenté par l'école laïque où il enseigne.
Pour réaliser ce projet, Gaston Bonnin, par des achats ou des échanges, va devenir propriétaire de 32 parcelles, soit une superficie de 6973 m2, et il en fait donation à la Couarde, aux conditions suivantes :
- Le terrain devra être transformé en place publique portant à perpétuité le nom de son fils, les plaques étant placées sur les murs des maisons d'habitation du groupe scolaire. On peut encore voir ces plaques, à leur emplacemnt d'origine.
- Le monument aux morts en l'honneur des enfants de la commune victimes de la guerre devra être bâti sur cette place.
- La commune s'engagera aussi à entretenir, après la mort des époux Bonnin, le monument funéraire contenant leur corps et celui de leur fils, érigé dans le cimetière de la Couarde.
Gaston Bonnin est le premier à s'inscrire sur la souscription miunicipale destinée à la construction du monument, pour la somme (importante à l'époque) de 1000 francs. Il y met plusieurs conditions : "Que la liste des morts pour la Patrie soit inscrite sur le marbre par ordre de grade et qu'il lui soit permis de faire graver sur le monument un sonnet écrit en leur honneur". La première de ces conditions permet au nom de Roger Bonnin d'apparaître en tête de la liste, car il était le plus gradé des morts de la commune.
La souscription va connaître un grand succès populaire. 185 couardais vont y souscrire pour une somme globale de 8541 francs. La municipalité y ajoutera une somme de 1459, portant ainsi les fonds recueillis au chiffre symbolique de 10 000 francs.
Chacun veut participer à l'édification du monument. Les maçons de La Couarde offrent gracieusement leur concours pour la construction des fondations. Le village se mobilise pour éxécuter les travaux d'aménagement du square "Roger Bonnin" et, par demi-journées, 98 couardais vont effectuer plus de 130 journées de travail.